La future réforme du système de retraite

Publié le 27/11/2019

Le 18 juillet 2019, Jean-Paul Delevoye a remis ses propositions relatives à la future réforme du système de retraite. L’objectif est de fusionner l’intégralité des 42 régimes existants à ce jour en un seul régime universel à points commun à toutes les catégories professionnelles, et dans lequel 1 euro cotisé vaudrait les mêmes droits pour tous.

 

La réforme entrerait progressivement en vigueur à partir de 2025.

 

1. La date d'application de cette réforme

Ce projet de réforme fera l’objet d’une mise en place progressive à compter de 2025.

Elle concernera les générations :

  • nées depuis 1963
  • et qui sont à plus de 5 années de leur départ en retraite

Il est par ailleurs à noter que les intéressés nés en 1963 mais partant en retraite avant 2025 – au titre d’un départ anticipé par exemple – ne seront pas touchés par cette réforme.

2. Les âges de départ

  • L’âge légal de la retraite reste fixé à 62 ans

Les Français pourront donc faire valoir leurs droits à la retraite à partir de 62 ans s’ils le souhaitent

  • Il est instauré le concept d’âge pivot fixé à 64 ans
  • Il s'agit de l'âge à partir duquel un assuré pourra partir à la retraite sans subir aucun abattement sur son montant.
  • S’il part avant 64 ans, il subira une décote de 5% / an
  • S’il part après 64 ans, il bénéficiera d’une surcote de 5% / an
BON À SAVOIR

Cet âge pivot est susceptible d’être modifié en fonction de l’évolution de l’espérance de vie moyenne.

 

  • Le dispositif de départ anticipé pour carrière longue avant 62 ans sera maintenu.

Rappelons que ce dispositif concerne 25% des départ à la retraite actuels (à l’assurance retraite)

La retraite anticipée au titre du handicap est également maintenue, et devrait être améliorée.

  • S’agissant des régimes spéciaux, les âges de départ spécifiques seront progressivement alignés sur cet âge pivot, à l’exception de certains métiers régaliens.

La transition sera très progressive :

  • Ces âges de départ spécifiques seront maintenus pour les fonctionnaires ayant validés au 31 décembre 2024 une durée de service de 17 ou 27 ans.
  • Pour ceux qui n’auraient pas atteint cette durée minimum, l’âge d’ouverture des droits sera relevé de 4 mois par génération.

3. le calcul de la retraite du régime universel

  •  Le nouveau système de retraite sera un système à points.

Le nombre de points acquis tout au long d’une carrière sera multiplié par la valeur de service de ce points.

BON À SAVOIR

La valeur du point équivaudrait à 0,55 euros de retraite annuelle brut.

 

  • Chaque enfant donnera lieu à une majoration de 5% du montant de cette retraite. Cette majoration pourra être accordée soit à l’un des deux parents de l’enfants, soit repartie à part égale entre les deux parents.
BON À SAVOIR

A noter cependant que cette décision devra être prise aux 4 ans de l’enfant. A défaut, la majoration sera automatiquement attribuée à la mère.

 

  • Il convient également de mentionner qu’un minimum de retraite a été prévu, et dont le montant serait fixé à hauteur de 85% du SMIC net en vigueur pour une carrière complète - soit 1000 euros par mois, en se basant sur le montant du SMIC de 2019. Le détail des conditions d’attribution de ce minimum, et notamment de la définition « d’une carrière complète » reste cependant à définir.
  • Le chômage indemnisé permettra également des points de retraite ayant la même valeur que les points acquis du fait d’une activité professionnelle. Ces points seront calculés sur la base de l’allocation perçue. Aucune information n’a été divulguée pour le moment au sujet des périodes de chômage non indemnisé.

4. Exemples de calculs chiffrés

EXEMPLE A 64 ANS

Un salarié partant en retraite à l’âge de 64 ans et ayant acquis à cet âge 40 000 points bénéficiera d’une retraite de 22 000 euros par an :

40 000 (points de retraite) X 0,55 € (valeur du point) = 22 000€ bruts annuels

 

EXEMPLE AVANT 64 ANS

Si ce même salarié avait décidé de prendre sa retraite plus tôt, à ses 62 ans, il subira une décote de 10% du montant de sa retraite. En supposant qu’il acquiert 1 000 points par an en fin de carrière, il ne disposerait plus que de 38 000 points à 62 ans, et 39 000 points à 63 ans.

Sa retraite se calcule donc comme suit :

A 62 ans : 38000(points de retraite) X [ 0,55 € (valeur du point) – 10% (décote) = 0,495 ] = 18 810€ bruts annuels

A 63 ans : 39 000(points de retraite) X [ 0,55 € (valeur du point) – 5% (décote) = 0,5225 ] = 20 377, 50€ bruts annuels

 

EXEMPLE APRÈS 64 ANS

S’il décide de retarder la date de son départ en retraite jusqu’à ses 65 ans, il bénéficiera d’une surcote de 5%, le calcul de sa retraite serait donc le suivant :

41 000 (points de retraite) X [ 0,55 € (valeur du point) + 5% (surcote) = 0,5775 ] = 23 678 euros bruts annuels

 

5. En savoir plus sur le versement des cotisations et l’acquisition de points de retraite

Jean-Paul Delevoye a confirmé à plusieurs reprises que 100 euros de cotisations versées donneront droit à 5,5 euros de retraite par an. Concrètement, les cotisations génératrices de droits pour la retraite seront réparties et calculées comme il suit :

  • Combien cotisera un salarié ou un fonctionnaire ?

Les taux de cotisation seront de 28,12% sur la rémunération brute, répartis à 60% pour les employeurs et à 40% pour les salariés.

  • Sur ces 28,12% de cotisations prélevées :
    • 10 % seront destinées à financer la solidarité et ne financeront pas des points de retraite
    • 90 % permettront d’acheter des points de retraite

1 point de retraite sera acquis tous les 10 euros de cotisations versées. Ce point de retraite vaudra 0,55€ (hors indexation) Dans le tableau ci-dessous, nous avons pris pour exemple un salarié bénéficiant d’un salaire annuel brut de 36 000 euros, et avons calculé les cotisations qui seront prélevées sur ce salaire, ainsi que le montant des droits de retraites qui seront validés au titre de ces cotisations.

36 000 €

Cot.totale : 28,12 %

Cot. Utile : 25,31%

10 123 €

(28,12%)

9 110€

(25,31%)

911 points

(9 119 / 10)

501,50€
Revenu Brut annuel Revenu Brut annuel Cotisation totale Cotisation utile Points de retraite validé Montant de retraite acquis

 

Il est à noter que l’assiette de cotisation sera plafonnée à hauteur de 120 000 euros par an.

Aucun droit de retraite ne sera acquis au-delà de cette limite. Toutefois, des cotisations au titre de la solidarité continueront à être prélevées sur le revenu brut au-delà de 120 000 euros à hauteur de 2,81%.

BON À SAVOIR

Pour les fonctionnaires, les primes seront désormais incluses dans l’assiette de cotisations.

 

  • Combien cotisera un travailleur non salarié ?

Le taux de cotisation des travailleurs non-salariés s’opérera en fonction du montant de ses revenus, et selon les 3 tranches qui suivent :

  • jusqu’à 40 000€ de revenu annuel : 28,12 % de cotisations sur le revenu, dont 90 % contributifs (soit 25,31%) et 10% pour la solidarité (soit 2,81%),
  • de 40 000€ à 120 000€ : 12,94% de cotisations sur le revenu, dont 78,3 % contributifs (soit 10,13%) et 21,7% pour la solidarité (soit 2,81%),
  • au-delà de 120 000€ : 2, 81 % non productifs de droits.
BON À SAVOIR

L’assiette minimale de cotisations sera relevée à 6000 € contre 4500 € aujourd’hui (soit un peu plus qu’actuellement pour les non-exploitants agricoles et un peu moins pour les exploitants agricoles)

 

Dans la situation d’un travailleur indépendant percevant un revenu annuel de 100.000 euros, les cotisations et les droits de retraite obtenus seront repartis comme il suit :

  Répartition en tranche Taux de cotisations Cotisation totale Cotisation utile Points de retraite validé Montant de retraite acquis
Tranche 1 de 0 à 40 000€ 40 000 € (soit l’intégralité de la première tranche) Cot.totale : 28,12 % Cot. Utile : 25,31 % 11 248 € (28,12 %) 10 123 €(25,31 %) 1 012 points (10 123 €/ 10) 556,60 € (1 012 X 0,55 €)
Tranche 2 de 40 000€ à 120 000€ 60 000 € (soit la différence entre le revenu et la première tranche) Cot.totale : 12,94 % Cot. Utile : 10,13 % 7 764 € (12,94 %) 6 079 € (10,13 %) 608 points (6 079 €/ 10) 334,40 € (608 X 0,55 €)
Total 100 000€ (le revenu étant inférieur à 120 000 €, l’intégralité sera soumis à cotisation utile)   19 012€ 16 202 € 1 620 points 891€

Certaines dérogations et garanties seront cependant appliquées dans des cas spécifiques :

  • Les micro-entrepreneurs auront la possibilité, sur option, d’acquérir une garantie minimale de points.
  • Des dérogations seront maintenues pour les artistes-auteurs, les artistes du spectacle, les marins et les journalistes qui continueront à bénéficier d’une réduction de de leur taux de cotisation sans réduction de leurs droits à retraite.
  • Les aidants, c’est-à-dire une personne qui s’occupe d’une personne handicapée (enfant ou adulte) ou d’une personne dépendante ou malade, bénéficieront d’une garantie de points.

6. En savoir plus sur la réforme de la pension de réversion

Au terme de cette future réforme, les pensions de réversion seront réservées au dernier conjoint survivant. Les droits des ex-époux seront fermés pour les divorces intervenus après l’entrée en vigueur du système universel.

BON À SAVOIR

Ce point devrait notamment être intégré dans les affaires de divorce par le Juge aux Affaires Familiales.

 

Le montant de ces futures pensions de réversion correspondra à la différence entre le montant représentant 70% des droits à retraite du couple, et de la retraite personnelle de la veuve ou du veuf.

EXEMPLE

Un couple dispose des droits à retraite cumulés de 50 000 euros par année. Le conjoint survivant dispose d’une retraite personnelle d’un montant de 20 000 euros. Sa pension de réversion sera calculée comme suit : 

50 000 (retraites cumulées du couple) X 70% = 35 000 euros

35 000 – 20 000 (retraite du conjoint survivant) = 15 000 euros annuels bruts de pension de réversion

 

7. L’analyse de Sapiendo

  • Ce nouveau régime se caractérise par la disparition des trimestres.

Seul l’âge de la liquidation et le nombre de points acquis, c’est-à-dire les revenus (dans certains cas le statut social) auront un impact sur le calcul de la retraite.

Pourront être perdantes les personnes qui avaient le bon nombre de trimestres 62 ans et qui devront désormais attendre 64 ans.

  • Le nouveau dispositif de surcote

Tel que mentionné plus haut, la notion de trimestre disparaitra et seul l’âge du départ en retraite influencera le calcul de la retraite. Ainsi, un retraité ne bénéficiera d’une surcote qu’à la seule condition qu’il demande l’attribution de sa retraite au-delà de ses 64 ans, à raison de 5% par année de décalage.

Or, dans le système actuel, un cotisant peut bénéficier d’une surcote de 5% par année travaillée supplémentaire, lorsqu’il poursuit son activité professionnelle au-delà de ses 62 ans, et à condition qu’il justifie du nombre de trimestre requis à cet âge.

De nouveau, les personnes qui remplissaient les conditions pour bénéficier d’un départ sans décote dès 62 ans, perdront leurs droits de surcote s’ils décident de poursuivre leur activité entre 62 et 64 ans.

  • La nouvelle majoration de 5% par enfant.

Ce nouveau système est-il plus ou moins avantageux que le dispositif actuel ?

Pour rappel, dans le système actuel un enfant génère deux types de bonifications :

  • Une majoration de 8 trimestres par enfant:
  • Une majoration de 10 % du montant de la retraite à compter du 3ème enfant pour chacun des deux parents

Pour une personne née en 1963, 168 trimestres sont requis. La majoration de 8 trimestres acquis pour un enfant représente donc l’équivalent de 4,76 % (8/168= 0,0476) du montant d’une retraite personnelle.

Désormais, il n’y a plus qu’un type de bonification : une majoration de 5% du montant de la retraite par enfant. Ces enfants n’ont donc plus d’influence sur l’âge du départ en retraite, mais contribuent à améliorer le montant d’une retraite pour un montant à peu près équivalent à la majoration de 8 trimestres dans le système actuel. En revanche, la majoration de 10 % pour « famille nombreuse » à partir du 3ème enfant disparait.

  • Moins de droits à retraite pour les cadres supérieurs

Les cadres bénéficiant d’un salaire annuel brut supérieur à 120 000 euros verront leurs droits à retraite baisser puisqu’au-delà de cette limite de 120 000 euros par an, aucune cotisation pour la retraite ne sera versée.

Nous avons pris ci-dessous pour exemple le cas d’un cadre supérieur percevant un revenu de 250 000 euros sur une année, en détaillant le montant des cotisations versées ainsi que les droits de retraite qui en découlent, dans le système actuel et dans le nouveau système.

Cotisations versées pour un salaire annuel brut de 250 000 € 67 925 € (calculé sur une assiette de 250 000 €, pour la retraite de base et complémentaire)

37 397€ (calculé sur une assiette de 120 000 €)

120 000 X 0,2812 (taux de cotisation) + 130 000 X 0,0281 (cotisation déplafonnée)

- 30 528 € (soit 44,9% de moins dans le nouveau système)
Montant annuel de retraite acquis Auprès du régime de base : 727 €*

Auprès des caisses complémentaires : 2 831 €**

Soit un total de : 3 558 €/an

856 €/an (33 744 X 0,9 (Cotisations utiles) X 0,55) - 1 702 € (soit 47,8 % de moins dans le nouveau système)
  Dans le système actuel Dans le nouveau système Différences

*36 359,24 (salaire annuel moyen maximal) / 25 (nombre d’années prises en compte à la Cnav) X 50% (taux plein de la Cnav) = 727 €

** 2 249 points Agirc- Arrco X 1,2588 = 2 831 €

SUGGESTION SAPIENDO

Le salaire gagnant pus de 120 000 euros devraient réinvestir les cotisations qui seront économisées dans un contrat d’épargne retraite.

Toutefois, les versements dans les contrats retraite sont déductibles des revenus imposables que dans la limite de certains plafonds (10% du revenu annuel net de l’année N-1 dans la limite de 8 fois le plafond de la Sécurité Sociale, soit au maximum 31 785 € en 2019).

Dans l’exemple précité, le montant des cotisations à réinvestir serait supérieur à 10 % du salaire annuel, et donc supérieur à ce plafond.

Il conviendrait dès lors d’augmenter ces plafonds de déductibilité fiscale pour ces personnes afin qu’elles puissent compenser efficacement l’absence de cotisations dans le futur régime obligatoire par un surplus de versement dans les contrats d’épargne retraite.

 

  • Pour les travailleurs non salariés :

Pour les travailleurs non salariés, cette réforme est plutôt annonciatrice de mauvaises nouvelles.

Ces derniers se verront imposer au-delà de 40 000 euros une contribution à la solidarité proportionnellement plus importante que les salariés. En effet, la cotisation de solidarité de 2,81% représente 10% de la cotisation totale des salariés, alors qu’elle représente 21,7 % de la cotisation totale des travailleurs non salariés au-delà de 40 000 euros de revenus. Par ailleurs, les indépendants bénéficient de moins de dispositifs de solidarités que les salariés – par exemple, le chômage.

En outre, les revenus les plus faibles se verront imposer des cotisations minimales supérieures, là où les plus hauts revenus verront leurs cotisations baisser progressivement, et en conséquence, le montant des droits acquis pour leur retraite.

Enfin, l’assiette de cotisation sera augmentée puisque les cotisations ne seront plus assises sur le revenu net déclaré, comme aujourd’hui, mais sur une assiette brute reconstituée.

Ce nouveau mode de calcul compliquera la compréhension des indépendants concernés. Nous restons cependant en attente de précision pour effectuer des simulations.

  • Pour les fonctionnaires et les régimes spéciaux : une révolution

Analyse à venir dans l’attente de précisions supplémentaires.

  • Une phase de conversion et transition à surveiller

Les droits à retraite seront calculés en euros et convertis en nouveaux points de retraite.

Une vigilance toute particulière sera donc exigée pour que ces droits à retraite soient calculés à partir d’un relevé de carrière corrigé et à jour.

8. Les documents officiels

Sapiendo met à votre disposition le rapport complet de M. Jean Paul Delevoye ainsi que ses annexes :

Adresse de correspondance : 16 rue d’Athènes 75009 PARIS

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